Le proxitravail, enfant du coworking et du télétravail ?

Le proxitravail, c'est du télétravail dans des espaces de coworking ? En quelque sorte, mais pas exactement. Alors, qu'est-ce qui unit et qu'est-ce qui sépare proxitravail et coworking ? Quelles similitudes, complémentarités et différences entre espace de coworking et espace de proxitravail ?

Le proxitravail, enfant du coworking et du télétravail ?
Photo : Karim MANJRA / Unsplash

C'est l'histoire d'une naissance. Comme toute naissance, elle trouve son origine dans une rencontre.

Oui, c'est bien la rencontre puis l'union entre coworking et télétravail qui a donné naissance au proxitravail.

Dans cet article, nous allons d'abord rappeler les historiques et définitions (en distinguant sens correct ou réducteur, sens large ou strict) :

  • Du télétravail d'abord, et assez brièvement (parce que le Petit Guide 2023 du Proxitravail en parle déjà beaucoup) ;
  • Du coworking et des espaces de coworking ensuite, et un peu plus longuement.

Puis nous expliquerons en quoi le proxitravail peut apparaître comme filiation de ce couple formé par le télétravail et le coworking.

Mais la filiation ne suffit pas à forger une identité. Alors, nous verrons enfin pourquoi il conviendrait de nommer le proxitravail par son propre nom et de le reconnaître comme tel, et pas seulement par sa filiation.

Nous ferons même plusieurs propositions pour développer le proxitravail, et faire en sorte que de nombreuses parties prenantes en retirent les bénéfices.


1. Le télétravail, des années 50 à nos jours

Histoire du télétravail en bref

L'invention du télétravail remonterait aux années 1950. Aux États-Unis, Norbert Wiener, père de la cybernétique, aurait été le premier à réaliser le potentiel d'une innovation technologique qui n'en était encore qu'à ses balbutiements : le fax.

Il aurait alors démontré qu'il était possible de superviser depuis l'Europe les travaux d'un bâtiment outre-Atlantique, en transmettant des informations par fax.

Mais c'est dans les années 1970 que le télétravail apparaît vraiment en tant que tel. En 1972, un article du Washington Post parle de "telework".

En 1973, Jack Nilles, un autre américain, ancien de la NASA, directeur de recherches à l'Université de Caroline du Sud, propose le "telecommuting" comme solution aux embouteillages monstres de Los Angeles. Et peut-être aussi à la crise du pétrole qui commençait tout juste !

Dans les années 1990, l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la communication, et en particulier d'internet, donne un premier véritable élan au télétravail.

Depuis les années 2000, preuve que le télétravail est une réalité, il est désormais un objet de discussions politiques, sociales et juridiques, y compris en France et en Europe :

  • Accord-cadre européen en 2002 ;
  • Ordonnances Macron en 2017 ;
  • Accord national interprofessionnel en 2020...

Enfin, en mars 2020, la crise sanitaire a donné une autre dimension au télétravail. Pendant les premiers confinements, en France, près de la moitié des salariés a télétravaillé.

Depuis la fin des confinements, quoi qu'en disent certains, le télétravail reste à des niveaux de pratique bien supérieurs à ceux d'avant 2020. Les accords d'entreprise, dont beaucoup se renégocient en 2024, confirment la pérennisation du télétravail, à des degrés divers et sous des formes diverses.

Définition du télétravail

Sauf à ce que vous n'ayez encore jamais entendu parler du proxitravail, des tracances ou du workation, du nomadisme numérique ou des digital nomads, vous le savez déjà :

  • Non, tout travail à distance n'est pas du télétravail ;
  • Non, tout télétravail ne s'effectue pas au domicile ;
  • Réduire le télétravail au seul télétravail à domicile (que l'on devrait nommer "domotravail"), c'est donc très réducteur.

Quand on parle télétravail, il faut savoir de quoi on parle. Alors voici la définition du télétravail, donnée par le Code du travail (article L1222-9) :

"Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication."

L’accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020 "pour une mise en œuvre réussie du télétravail", connu aussi comme "ANI télétravail", reprend cette définition en la complétant avec la précision suivante :

"Dans la pratique, [le télétravail] peut s’exercer au lieu d’habitation du salarié ou dans un tiers-lieu, comme par exemple un espace de co-working, différent des locaux de l’entreprise, de façon régulière, occasionnelle, ou en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure. En tout état de cause, la mise en œuvre du télétravail doit être compatible avec les objectifs de performance économique et sociale de l’entreprise."

Puisque le lien entre télétravail et coworking est établi, au même titre (ni plus, ni moins) que celui entre télétravail et domicile et celui entre télétravail et d'autres types de tiers-lieux que les seuls espaces de coworking, parlons maintenant :

  • Du coworking ;
  • Et, plus largement, de ces autres types de tiers-lieux parfois assimilés au coworking.
Photo : Bench Accounting / Unsplash

2. Le coworking, (ré)invention du XXIème siècle

Histoire courte du coworking

Oui, l'histoire du coworking est plus courte encore que celle du télétravail. Son histoire moderne en tout cas.

En effet, même si certains font remonter ses origines au Moyen-Âge (dans les monastères) ou à la Renaissance (dans les ateliers florentins), le coworking tel que nous le connaissons est né juste avant l'an 2000. Maintenant, alors que le XXIème siècle est déjà bien entamé, il poursuit sa croissance.

Chronologie

Voici donc les dates les plus significatives des jeunes années du coworking :

  • 1995, à Berlin - Ouverture de C-base, un hackerspace où des passionnés de technologie se retrouvent, échangent et travaillent dans un cadre libre et ouvert.
  • 1999, aux États-Unis - Bernie De Koven serait le premier à utiliser le mot coworking. Il désigne alors une méthode facilitant le travail collaboratif, une forme de travail non compétitive, d'égal à égal.
  • Toujours en 1999, à New York - Ouvertures de 116 West Houston, club professionnel, dédié aux entrepreneurs créatifs de la "big apple" et qui met l'accent sur la valeur de la communauté, et de 42 West 24, pionnier des espaces de travail flexibles.
  • 2002, à Vienne - Ouverture de la Schraubenfabrik, centre communautaire pour entrepreneurs, et probablement la première ébauche de coworking en Europe.
  • 2005, à San Francisco - Fondation par Brad Neuberg, sous forme de coopérative, du premier espace de coworking nommé ainsi, en réponse aux inconvénients des centres d'affaires, "totalement asociaux", et du home office, accusé de brider la productivité.
  • 2007 - Le mot coworking devient une tendance forte parmi les recherches Google.
  • 2008, à Paris - Silicon Sentier ouvre La Cantine, premier espace de coworking en France, lieu dédié aux indépendants et aux entrepreneurs du numérique, avec une vraie communauté favorisant le partage et de développement de compétences.
  • 2010 - 600 espaces de coworking dans le monde, dont plus de la moitié en Amérique du Nord.
  • 2012 - Le cap des 2000 espaces de coworking dans le monde est franchi.
  • 2020 - Le secteur du coworking, comme la plupart des secteurs de l'économie, est frappé par la crise sanitaire. Certains acteurs ne s'en remettent pas, d'autres s'adaptent et en retirent de nouvelles opportunités.

Le coworking de nos jours

En 2024, au vu notamment, mais pas seulement, des récents événements concernant WeWork outre-Atlantique, le coworking semble encore en pleine crise d'adolescence.

Il poursuit toutefois sa croissance, avec déjà plus de 35000 espaces de coworking dans le monde, et probablement bientôt 4000 en France.

Coworking, espace de coworking : plusieurs définitions

Que signifient ces chiffres que nous venons de découvrir ? Qu'est-ce qu'un "espace de coworking" ? Et d'ailleurs, le concept de coworking peut-il se réduire à un espace ?

Force est de constater que ces questions n'ont pas de réponse unique. Et donc, dénombrer les espaces de coworking en France, en Europe et dans le mode, cela nécessite de bien définir et d'indiquer ce que l'on entend par "coworking" et "espace de coworking".

Coworking, sens strict ou sens large, avec ou sans valeurs

Voyons d'abord la définition du coworking ou plutôt du "cotravail" selon Larousse :

"Mode de travail basé sur l’utilisation d’un même espace par des professionnels indépendants, afin de partager les expériences et de favoriser la créativité."

Curieusement, le mot coworking (ou co-working) est absent de nombreux dictionnaires de langue anglaise. Toutefois, Cambridge Dictionary définit le "co-working" ainsi (traduction en français par mes soins) :

"Une manière de travailler dans laquelle des personnes qui travaillent pour différents employeurs ou pour elles-mêmes partagent un bâtiment ou bureau, souvent afin de pouvoir partager des idées".

Ces deux définitions sont sensiblement différentes. Celle de Larousse est plus restrictive que celle de Cambridge Dictionary, au moins sur ces deux aspects :

  • Le public concerné (seulement des travailleurs indépendants pour le premier, des salariés et des entrepreneurs pour le deuxième) ;
  • La notion de partage d'idées ou d'expériences (objectif semble-t-il absolu pour Larousse, seulement fréquent pour Cambridge Dictionary).

Au sens le plus strict, le coworking se définit généralement à partir des éléments suivants :

  • Un réseau, voire une communauté de membres ("coworkers"), très majoritairement voire exclusivement des travailleurs indépendants et autres entrepreneurs ;
  • Des espaces partagés, mutualisés et flexibles ;
  • Des aménagements et un environnement de travail différents des bureaux traditionnels, pour favoriser créativité, collaboration, productivité, etc. ;
  • Et même des valeurs, telles que collaboration, coopération, ouverture, durabilité. accessibilité, communauté...

Au sens large, le coworking se résume au partage, voire plus largement encore à la simple utilisation d'un espace de travail qui n'est pas celui de l'entreprise.

Toujours au sens large, on désigne souvent "espace de coworking" cet espace de travail partagé qui est plus généralement un tiers-lieu (*), un lieu social autre que le domicile et l'entreprise, un lieu de travail d'un autre type.

(*) Note concernant le concept de tiers-lieu

Je préfèrerais parler de "troisième lieu".

Selon moi, cette traduction correspondrait mieux au concept de "third place" défini en 1989 par le sociologue américain Ray Oldenburg dans son livre The Great Good Place. Elle s'inscrirait dans la même logique d'opposition au premier lieu (first place) qu'est le domicile et au deuxième lieu (second place) qu'est l'entreprise.

Mais le terme "tiers-lieu" est désormais communément admis. Alors, ne compliquons pas plus les choses, et parlons de tiers-lieu.

Espaces de coworking, sens strict ou sens large aussi

Comme différentes définitions du coworking co-existent, plus ou moins restrictives, il y a effectivement aussi des différences entre espace de coworking au sens strict et espace de coworking au sens large.

Au sens le plus strict, un espace de coworking est un lieu dédié au coworking au sens le plus strict, c'est-à-dire :

  • Offrant des espaces partagés, mutualisés et flexibles, principalement des open-spaces, avec aussi des cabines pour passer des appels et des salles de réunions pour travailler en équipe ou recevoir des clients ;
  • Accueillant principalement des travailleurs indépendants et autres entrepreneurs ;
  • Incluant de manière significative dans leur gestion et leur animation les valeurs du coworking, telles que collaboration, coopération, ouverture, durabilité. accessibilité, communauté... ;
  • Favorisant le réseautage, l'esprit de communauté, le partage de compétences, la créativité, la collaboration, la productivité, etc., avec des espaces de convivialité et à travers des événements organisés avec un ou plusieurs de ces objectifs en point de mire.

Au sens large, la tendance est à nommer espace de coworking tout tiers-lieu qui propose des espaces de travail à usage flexible, que ce soit :

  • Des open-spaces partagés ou des bureaux privatifs, avec ou sans options de type salle de réunions ;
  • Avec des formules de location à l'heure, à la journée, hebdomadaires, mensuelles ou parfois trimestrielles, mais surtout pas en bail 3-6-9 ;
  • Pour des travailleurs indépendants, des entrepreneurs, des start-ups, des salariés en télétravail, ou parfois même des étudiants ou autres personnes nécessitant un espace de travail...

Au sens large donc, on met parfois tout cela "dans le même sac" et on utilise la désignation "espaces de coworking" également et indifféremment pour les bureaux flexibles, les bureaux partagés, les bureaux opérés, le corpoworking, les centres d'affaires, les télécentres, etc.

Le coworking selon Adam Neumann, ou selon Miguel McKelvey ?

Finalement, un bon résumé de la différence entre coworking au sens strict et au sens large, ou entre espace de coworking au sens strict et au sens large, apparaît dans la différence de vision des deux fondateurs de WeWork, le géant du coworking.

François-Xavier de Vaujany, professeur en sciences de gestion à l’Université Paris Dauphine-PSL, la résume ainsi à la fin d'une passionnante émission de France Culture (que je vous recommande vivement d'écouter en podcast) :

  • Pour le très controversé Adam Neumann, les gens viendraient chez WeWork "pour être avec les autres" (to be with each other), dans un véritable esprit de communauté et d'entreprendre ;
  • Tandis que pour Miguel McKelvey, ils y viendraient simplement "pour être à côté les uns des autres, pour trouver une atmosphère sociale, une esthétique, une ambiance, pas nécessairement une communauté" (to be around each other).
Photo : Austin Distel / Unsplash

3. Naissance du proxitravail

Et le proxitravail dans tout cela ?

Dans le Petit Guide 2023 du Proxitravail, je le définissais ainsi :

Le proxitravail désigne une forme de télétravail, non pas à domicile mais à proximité du domicile.
Il constitue une solution complémentaire et vertueuse, en réponse au classique dilemme entre :

Le travail sur site et les déplacements pendulaires induits entre le domicile et le bureau, qui s’avèrent de moins en moins pertinents au regard des coûts financiers et extra- financiers, d'une part, et des moyens technologiques et organisationnels pour travailler à distance, d'autre part ;
Et le télétravail à la maison, avec ses avantages mais aussi ses inconvénients et autres limites.
De façon pratique, le proxitravail consiste à télétravailler dans un espace de coworking, tiers-lieu d’activité professionnelle ou tiers-lieu hybride incluant cette orientation, localisé :
- À 5, 10 ou 15 minutes du domicile, de préférence à pied ou en vélo ;
- Et / ou à une distance significativement inférieure à celle qui sépare le domicile du bureau ou autre lieu de rattachement de l’emploi.

Quand nous parlons de proxitravail, il est donc bien question à la fois :

  • De télétravail, au sens du Code du travail et de l'ANI télétravail, pas au sens réducteur du domotravail ;
  • Et d'espaces de coworking au sens large.

En nous appuyant sur cette définition du proxitravail, nous pourrions lui attribuer les caractéristiques suivantes :

  • Le proxitravail est une branche du télétravail, comme le télétravail à domicile (ou domotravail) ou les tracances (ou workation) ou encore le télétravail en déplacement professionnel, pour n'en citer que quatre, sont d'autres branches ;
  • Le proxitravail adapte, réutilise et étend le concept de coworking en tant qu'espace de (télé)travail à usage flexible, hors de l'entreprise, et hors du domicile.

4. Le proxitravail clame ses différences... et son nom

Le proxitravail peut donc bien revendiquer un double héritage, du télétravail et du coworking.

Toutefois, parler de filiation n'est peut-être pas approprié. En tout cas, il ne faut pas en abuser. À trop mettre en avant une filiation, il pourrait être plus difficile d'affirmer la propre identité du proxitravail.

Ainsi, le proxitravail est bien une forme de télétravail. Mais il faut la différencier des autres formes de télétravail.

Il faut surtout la distinguer de cette autre forme que l'on devrait nommer domotravail ou télétravail à domicile, mais que beaucoup désignent maladroitement ou innocemment par le terme générique de télétravail.

De même, si pour vulgariser le proxitravail et l'expliquer au plus nombre, nous pouvons dire que c'est une forme de télétravail qui se pratique dans des espaces de coworking, il faut bien reconnaître que l'on parle ici d'espaces de coworking au sens large.

Pour être plus précis, il faudrait parler d'espaces de proxitravail.

Car, idéalement, un espace de proxitravail n'a pas exactement les mêmes caractéristiques qu'un espace de coworking au sens strict. Il s'en distingue notamment :

  • Par des bureaux privatifs, plus que des open-spaces ;
  • Par des offres collectives (aux employeurs), plus que des offres individuelles (aux travailleurs indépendants et autres entrepreneurs) ;
  • Par une localisation près des lieux de vie, pas seulement dans les hyper-centres et parcs d'affaires des métropoles ;
  • Par une moindre importance accordée à l'animation et à la communauté des membres ou autres utilisateurs.

5. Conclusions et propositions

Proxitravail, télétravail, coworking : un double héritage, des différences sans opposition

Un héritage n'est pas une fusion-absorption.

Le proxitravail est une forme de télétravail. Mais il n'est clairement pas aligné sur la forme commune (de nos jours), le télétravail à domicile.

Le proxitravail n'est pas en opposition au télétravail. Bien au contraire, il le complète, il l'enrichit. Il propose une forme alternative de télétravail, une forme qui répond aux inconvénients et aux limites du télétravail à domicile.

Les espaces de proxitravail font partie, avec les espaces de coworking, de la même famille, la grande famille des tiers-lieux d'activité professionnelle.

Les espaces de proxitravail se distinguent des espaces de coworking au sens strict, mais ils ne s'y opposent pas non plus. Ils peuvent même les compléter, les enrichir.

Comme il existe des boutiques spécialisées et des commerces généralistes ; comme il existe des boucheries, des charcuteries, et des boucheries-charcuteries ; comme il existe des cafés, des espaces de coworking, et des cafés-coworking... les espaces de proxitravail co-existent et parfois s'unissent avec les espaces de coworking.

Il peut donc y avoir co-existence dans une ville ou sur un territoire entre :

  • Un ou plusieurs espaces de coworking au sens strict ;
  • Un ou plusieurs espaces de proxitravail (exclusivement pour les salariés des entreprises en proxitravail) ;
  • Un ou plusieurs espaces mixtes coworking et proxitravail.

4 propositions pour le proxitravail

Pour clore cet article-dossier sur le proxitravail, le télétravail et le coworking, je formule quelques propositions qui s'adressent aux opérateurs et futurs opérateurs du secteur coworking (au sens large), employeurs, télétravailleurs, et collectivités territoriales intéressées à développer le proxitravail.

Comme le proxitravail lui-même, et parce qu'elles permettent de le développer, ces propositions apportent des réponses à de nombreuses préoccupations auxquelles le télétravail à domicile et le coworking (au sens strict) ne répondent pas de manière satisfaisante, ou qu'ils font naître parfois :

  • Réduction des mobilités pendulaires, car l'espace de proxitravail est par définition plus proche du domicile que ne l'est l'entreprise, et le proxitravail permet d'inclure des salariés qui ne peuvent ou ne veulent pas télétravailler à domicile ;
  • Réduction, en conséquence, des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution atmosphérique ;
  • Valorisation financière de cette réduction des mobilités, par un double mécanisme (certificats d'économie d'énergie et label bas carbone), via la plateforme VALO.RE développée par Relais d'Entreprises et soutenue par l'ADEME ;
  • Contribution aux plans de mobilité des territoires, autorités organisatrices de la mobilité et employeurs, aux politiques environnementales, aux démarches RSE (responsabilité sociétale des entreprises), etc. ;
  • Économies sur les coûts de l'immobilier et autres frais généraux des entreprises, flexibilité sur la location ;
  • Gains de temps pour les salariés ;
  • Avantages en termes d'expérience collaborateur, de productivité, de recrutement et de fidélisation des collaborateurs ;
  • Réduction des risques et contribution aux plans de continuité d'activité des entreprises ;
  • Contribution au lien social, à l'équité sociale, à la qualité de vie, à l'équilibre et à la séparation vie professionnelle / vie personnelle ;
  • Contribution à l'attractivité des territoires, à leur dynamisme économique et social, à la réduction des fractures territoriales ;
  • Participation aux politiques territoriales (urbanisme notamment) ;
  • Etc.

1. Des lieux adaptés au proxitravail

Pour développer le proxitravail, pour que plus de salariés puissent accéder à cette forme alternative de télétravail, près de chez eux, pour que plus d'employeurs autorisent ou encouragent leurs collaborateurs à proxitravailler, il faut qu'il y ait des tiers-lieux, des espaces de coworking au sens large, qui soient adaptés au proxitravail.

Comme nous l'avons évoqué plus haut, cette adaptation concerne plusieurs domaines :

  • L'aménagement, avec des bureaux privatifs ou privatisables ;
  • La localisation, proche des lieux de vie des salariés éligibles au télétravail ;
  • Les offres, incluant des options collectives pour les entreprises...

Notez qu'un lieu adapté au proxitravail peut être adapté aussi au coworking (au sens strict). Généralement, un tel lieu inclut des espaces dédiés au proxitravail, d'autres espaces dédiés au coworking et/ou d'autres encore à usage mixte.

2. Des lieux désignés et identifiés comme espaces de proxitravail

Il faut aussi que la dénomination de ces tiers-lieux indique clairement qu'ils sont adaptés au proxitravail.

Pour cela, on peut utiliser le mot proxitravail dans le nom même du lieu, ou dans sa description, son slogan, son accroche, sa signature...

Le mot proxitravail peut s'ajouter à d'autres, y compris bien sûr à coworking.

Ainsi, un lieu à usage mixte, proposant des aménagements et des offres de type coworking et d'autres de type proxitravail, peut se décrire comme "espace de coworking et de proxitravail".

À l'intérieur du lieu, après la réception commune, une signalétique peut indiquer où se situent respectivement les espaces de coworking et les espaces de proxitravail.

Dans certains territoires à vocation touristique, les espaces de proxitravail peuvent ajouter le mot tracances (ou workation en anglais) pour s'identifier aussi comme espace de travail destiné aux télétravailleurs nomades, réguliers ou occasionnels, qui séjournent sur leur territoire.

3. Le soutien des collectivités territoriales

Les communes, communautés de communes, départements, régions et autres collectivités territoriales trouvent de nombreux intérêts au proxitravail, notamment en termes d'attractivité, de dynamisme économique et de vie sociale.

Ces collectivités ne devraient donc pas hésiter à soutenir :

  • Les projets de création d'espaces de proxitravail sur leur territoire, pour les salariés qui y résident (ou des proches alentours) ;
  • Des expérimentations en mode espaces éphémères (pop-ups) ;
  • Les espaces de proxitravail déjà opérationnels.

Compte tenu des enjeux, le soutien des collectivités territoriales est particulièrement pertinent pour des espaces de proxitravail situés en périphérie des métropoles et des villes grandes ou moyennes, mais également au cœur des petites villes et dans les centres-bourgs en milieu rural.

Ce soutien peut aller d'un simple relai de communication à l'aide matérielle, financière et/ou logistique, voire à la prise en charge directe ou la participation au capital et à la gestion (sous statut de société coopérative d'intérêt collectif par exemple).

En particulier, la mise à disposition d'un local disponible (gratuitement ou à un tarif modeste) peut être très utile, ne serait-ce qu'à titre temporaire, à condition qu'il réponde aux critères de qualité suffisante pour un tel usage : luminosité, isolation thermique et phonique, connexion à la fibre ou internet très haut débit, et autres critères de confort pour un usage professionnel...

4. L'adhésion des employeurs et des salariés

Bien sûr, le proxitravail n'existe pas uniquement par la présence d'espaces de proxitravail. Encore faut-il que ces espaces ne soient pas vides !

En France, de nombreuses entreprises offrent déjà la possibilité de télétravailler hors du domicile. Cette démarche peut être passive (laisser faire) ou clairement affirmée, organisée voire encouragée.

Généralement, certaines conditions doivent être respectées : zones géographiques, fréquence, durée, conformité des installations du tiers-lieu, sécurité, etc.

Dans une publication sur LinkedIn, Nathanaël Mathieu, Directeur Recherche & Culture chez worklib, rapporte que "plus de 200 entreprises utilisent des espaces de télétravail à la demande via worklib partout en France".

Il précise encore que "cela s'inscrit dans des politiques RH ou immobilier généralement beaucoup plus larges (attractivité, full remote, flex office, ...)".

Aussi, alors que l'année 2024 verra la renégociation des accords sur le télétravail dans de très nombreuses entreprises (*), certaines DRH font déjà entendre leur intérêt pour le télétravail dans des tiers-lieux dédiés et adaptés.

Dans certains accords, le maintien de l'équilibre télétravail - bureau ou l'extension de la part télétravail pourraient même être conditionnés à une part en proxitravail ou autre forme de télétravail en tiers-lieu.

La question de la prise en charge totale ou partielle du proxitravail est évidemment déterminante dans l'adhésion des salariés.

Aussi, même s'il ne faut pas faire de généralités et qu'il y aura toujours des salariés qui préfèrent pour telle ou telle raison le domotravail, force est de constater que lorsque l'employeur leur permet ou facilite l'expérience du télétravail en tiers-lieu, et en particulier du proxitravail, la plupart des salariés trouvent un intérêt à répéter cette expérience plus ou moins régulièrement.

(*) Voir la newsletter de janvier 2024 (si vous ne la retrouvez pas dans vos mails, elle est aussi ici sur LinkedIn).

6. Pour aller plus loin

⓵ Vous avez des questions, des réactions, des commentaires, des suggestions, suite à la lecture de cet article ? 👉 N'hésitez pas à m'en faire part via ce formulaire de contact. Je me ferai un plaisir de vous répondre.

⓶ Lisez le Petit Guide 2023 du Proxitravail, pour tout savoir sur cette autre forme de télétravail, non pas au domicile, mais dans des espaces dédiés (qui sont parfois aussi des espaces de coworking) à proximité du domicile des salariés. Téléchargez gratuitement cet e-book de 84 pages en cliquant sur le lien ci-dessous. 👇

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